vendredi 15 décembre 2023

RAL n°140


2ème semestre 2023


La Revue Alsacienne de Littérature créée en 1983 à Strasbourg a un long parcours éditorial. Autour de la thématique « DEMAIN », le numéro 140 de décembre 2023 marque son quarantième anniversaire.


Parmi les thèmes qui ont figuré au sommaire des derniers numéros, signalons Frontières pour le n°131, Trames pour le n°132, Résonances pour le n°134, Horizons pour le n°135 avec un hommage à Claude Vigée, Divaguer pour le n°138 et L’inachevé pour le n°139.



Nicolas de Staël, “Fleurs”, 1952


lundi 20 novembre 2023

RAL n°140


Éditorial & Sommaire du numéro

à paraître en décembre 2023

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Dossier thématique

« Demain »


Nicolas de Staël, Agrigente, 1954, huile sur toile.



ÉDITORIAL


Fondée en 1983 par Auguste Wackenheim, la Revue alsacienne de littérature a vu paraître le premier numéro en septembre 1983. Pour fêter dignement notre quarantième anniversaire, le dossier PATRIMOINE republie quelques pages choisies. Auguste Wackenheim, le président fondateur, ouvre cette sélection avec des textes et des dessins, suivi de quelques poèmes d’Adrien Finck, deuxième président de notre association. Claude Vigée, président honoraire, Fernand Schierer, longtemps secrétaire général, Camille Claus, illustrateur de plusieurs couvertures, Lucien Baumann, Gaston Jung et Anne-Marie Soulier complètent ce choix avec des textes en prose et en poésie. Ces auteurs, membres du comité de rédaction qui nous ont quittés, représentent la « triphonie » (français, alsacien dans ses différentes variantes, allemand), véritable ADN de la revue.

Le dossier thématique DEMAIN propose une riche variété de textes, toujours dans les trois expressions linguistiques. Nos lecteurs retrouvent dans la rubrique VOIX MULTIPLES une sélection de textes en prose et en poésie. Les CHRONIQUES s’ouvrent sur une réflexion de Vincent Wackenheim consacrée au jeu d’échecs en littérature. Martine Blanché propose une étude approfondie intitulée Émile Storck : Spitteler, poète lyrique. Vladimir Fišera, Paul Assall, Helmut Pillau, Marc Chaudeur et Marie-Yvonne Munch signent les autres contributions de cette rubrique. Les NOTES DE LECTURE complètent ce numéro.

Catherine Wackenheim-Jacobs, que nous remercions vivement, a réalisé des scans en numérisant quelques couvertures anciennes marquantes.

Notre gratitude va à nos abonnés pour leur fidélité. Nous présentons les meilleurs vœux à tous nos lecteurs et amis et leur souhaitons de belles fêtes.

Maryse Staiber & Marie-Thérèse Wackenheim

Le site internet dédié à la revue, créé par Alain Fabre-Catalan qui en assure l’administration, rend compte de notre actualité littéraire. Les auteurs y trouveront toutes les informations utiles pour connaître les thèmes abordés dans les prochains numéros. Le dossier thématique du numéro 141 de juin 2024 s’intitulera SUITES.

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SOMMAIRE

Camille Claus : Les membres du comité de rédaction

ÉDITORIAL

Auguste Wackenheim : couverture du n° 76, décembre 2001
     
PATRIMOINE

Auguste Wackenheim : Éditorial du n° 4, 4e trimestre 1983.      
E runder Tisch. Fremdàrweiter. Dr Accent-Deifel
Adrien Finck : Variationa üewer a Thema vom Nathan Katz.     
        Unheimetlig / Unheimatlich. Zungawiderstànd Fin de siècle
Claude Vigée : Bàll Speetsummer / Bientôt l’arrière-été       
Fernand Schierer : Approche d’une chronique. Pré-voir       
Camille Claus : Anti-poème. Le feu d’Héraclite      
Lucien Baumann : Tournesol     
Gaston Jung : Triphonie. Glaanichkaide. Quitter un territoire.      
        Gluet Bluet Saame / Braise Sang Semence
Anne-Marie Soulier : Mon pays. Skylines. Que vois-je ?      

Camille Hirtz : couverture du n° 93, 1er trimestre 2006

DEMAIN

Alain Fabre-Catalan : Le jour d’après      
Andrea Moorhead : Dans la splendeur de ton absence     
Gilles Marie : Entre Rugles et Alençon     
Eva-Maria Berg : das morgen ist / kein morgen     
Emma Guntz : Gestern war / Heute ist     
Marc Chaudeur : Morje Morje     
Anne-Marie Zucchelli : Les lendemains affleurants     
Victor Saudan : Demain / Mor’n     
Max Alhau : Quatre poèmes     
Laurent Bayart : Demain tendu     
Laurence Muller : Que deviennent les cristaux brisés   
Denis Leypold : Au seuil des jours  
Marie-Jeanne Langrognet-Delacroix : Si tout demain…   
Gabrielle Makli : Demain n’existe plus     
Marie-Yvonne Munch : Une autre vie     
Maryse Staiber : Morgen vielleicht / Demain peut-être   
Joachim Kaboré-Drano : Tout demain vit en moi   
Martine-Gabrielle Konorski : Dans un soupir… Beauté / si loin si proche    
Fabrice Farre : Solitude. Mars. Abyme. Vers toi. Barque    
Sophie Weill : Jeux de mains
Pierre Judide : Pensées pour temps extrêmes     
Françoise Urban-Menninger : Demain ne sera pas un autre jour      
        Demain tu verras ce sera mieux
Daniel Martinez : Confins du monde      
Alix Lerman Enriquez : Demain      

Couverture du numéro 100, 4e trimestre 2007

VOIX MULTIPLES

Martine Blanché : Hartmannswillerkopf. Au fond du vallon.
        Le long du rempart de mes rêves
Arnoldo Feuer : Mehr Licht. Bouteille d’encre.      
        Volée de moineaux sur l’arbre mort
Jutta v. Ochsenstein : Zugvögel. Ich bin. Nie wieder       
Armand Peter : Drey Kinder in Hanoi      
Jean-Christophe Meyer : Laisse-nous encore…    
Ìm Kritzgàng. Am Lispàch-See
Claudia Scherer : lichtung. vaulx-en-velin     
Luminitza C. Tigirlas : J’avais une joue en feu…     
Wendelinus Wurth : Achtung – fertig – los    
Gabriel Zimmermann : D’emblée la phrase est pâteuse…    
        Pendant qu’une femme… La romancière dans la lettre…Dans la rue…
Claude Vancour : Poème retrouvé, Alsace. Comme une vague qui se hisse.    
        Les oiseaux derrière moi
Marie-Yvonne Munch : Saveurs du silence     
Michael Benaglio : Verlasst den Saal. Kuss der Lebensglocken    
Karlheinz Kluge : Der schwarze Anzug   
Pierre Zehnacker : Hommage à Albert Strickler. Petite variation baroque.    
        La mer retrouvée. Ce que j’ai toujours attendu. L’ombre d’un tableau

Couverture du n° 55, 1996. Gaston Jung : Trajectoires, entre poésie et spectacle      

CHRONIQUES 

Vincent Wackenheim : Le jeu d’échecs et la littérature    
Martine Blanché : Émile Storck : Spitteler, poète lyrique   
Vladimir Claude Fišera : Le roman de référence sur l’Ukraine contemporaine.
        Le roman fondateur des lettres et de l’identité ukrainiennes
Paul Assall : Einhorn der Liebe. Über die Tapisserien der Dame à la Licorne
        im Musée Cluny in Paris
Helmut Pillau : „Ein Archäologe mit Schlagseite“. Zu Gabriel Zuchtriegel,       
        Vom Zauber des Untergangs. Was Pompeji über uns erzählt
Marc Chaudeur : Le festival musica 2023      
Marie-Yvonne Munch : Gertrude Stein et Pablo Picasso,     
        l’invention du langage

Tomi Ungerer : couverture du n° 62, 2e trimestre 1998      

NOTES DE LECTURE



vendredi 30 juin 2023

RAL n°139

 

1er semestre 2023


LE LEVAIN DE L’INACHEVÉ

Le sens et l’oubli ont en commun d’être interminables.
Bernard Noël
 
Qu’il s’agisse d’un geste, d’une émotion, d’une parole, d’une pensée, le désir qui nous entraîne au-devant d’une rencontre, d’un paysage, d’un horizon espéré, n’en est pas moins une épreuve qui relève à la fois des circonstances et de la confrontation avec un inconnu dont il reste à déchiffrer les traits singuliers. Ce n’est alors qu’une tentative, une ébauche, le commencement d’un parcours d’incertitudes, à travers maints détours qui conduisent à se jeter hors de soi, dans ce qui n’est qu’un élan, un regard sur ce qui n’a pas encore pris forme à la croisée des chemins de la création.

Inséparables, l’écriture et la vie se mêlent, se confortent ou se dispersent, cherchant une trace qu’il s’agirait de suivre mais on finit par comprendre qu’elle ne peut se suffire à elle-même, et qu’elle ne trouve son véritable sens qu’à s’ouvrir dans l’inachevé, quitte à revenir sur ses pas, à se relier à cet instant, cette épiphanie qui donne sens à la rencontre avec ce qui en nous demeure lié au plus vif. Tel est le chantier que l’écriture fouille.

L’oubli est l’ultime mesure du temps, ce temps qui échappe à qui veut le saisir dans le dédale de la mémoire et de ses illusions. La création se trouve ainsi partagée entre ce qu’il nous reste à faire de l’expérience des choses et ce qu’il s’agit de dire de ce qui échappe, de cet insaisissable qui vient de l’oubli, là où les choses n’ont pas encore de nom. Si la mémoire ne crée pas, c’est qu’elle reproduit l’enfermement du monde sur lui-même dans du définitif, du résolu faisant de l’écriture non pas la trame d’une rêverie, d’un imaginaire où les temps se superposent et s’enchevêtrent, mais un simple produit de consommation qui revendique son achèvement.

Il y a un point cependant sur lequel il est nécessaire d’insister, à savoir qu’on a trop souvent tendance à confondre l’inachevé avec l’inaccompli au sens d’imparfait ou d’approximatif. Comment une œuvre pourrait-elle s’accomplir si elle se constituait comme le point d’achèvement d’un geste créateur ? Cette prétention ne saurait qu’obéir à des normes et à des codes faisant par là même oublier le jeu et le plaisir de la transgression, cette prise de liberté qui permet au contraire d’envisager l’inachèvement comme un processus actif remettant en question la notion même d’œuvre. S’éloignant de cette fascination pour la beauté accomplie, l’époque moderne et contemporaine n’a eu de cesse de se réclamer de l’inachevé dans sa recherche de formes mouvantes et fragmentaires, témoignage du désir de représenter la vie dans son renouvellement et son invention permanente.

Ainsi le moderne work in progress vient-il légitimer l’inachevé comme définition constitutive du geste de création, au sens où il s’agit d’explorer l’au-delà des limites de la beauté et de la perfection comme du sens et de la signification dont l’artiste cherche à s’affranchir, jusqu’à choisir de prendre délibérément le parti d’un inachèvement perpétuel. Avec Kafka, Joyce, Proust, les avant-gardes littéraires, Blanchot, Barthes et tant d’autres, l’inachevé et le fragment ont triomphé renforçant l’attrait pour le goût des esquisses, des projets interrompus comme circonstance et condition de « l’œuvre ouverte » selon la définition d’Umberto Eco. Rappelons aussi l’importance du « carnet » jusqu’aux brouillons eux-mêmes qui ont fini par attribuer au processus de création dans ses méandres et ses errements à la limite du lisible, une importance et une signification égale à son état ultime.

La question de l’inachèvement dans le processus de création a permis de jeter des ponts, de tisser des liens entre les arts et les cultures, préalable incontournable à une rencontre des imaginaires, à une mise en relation des pratiques artistiques dans un métissage des formes et des genres. Que serait une création qui n’exigerait pas tout notre être et ne nous ferait pas sentir le poids de notre finitude ainsi que les transferts culturels qui caractérisent notre époque ? Qui écrit ou peint instaure l’alphabet de son langage en même temps que ce qu’il dit ou fait. Ce ne peut être le fruit d’une technique toute prête et d’un préalable qui donnerait sens à l’œuvre. Comme nous le fait entendre Walter Benjamin, dans le travail du sens et de la forme se faisant l’un par l’autre, c’est l’expression qui demeure inachevable et constant le désir qui grandit dans le levain de l’inachevé.

Alain Fabre-Catalan


Catherine Wackenheim-Jacobs
Des pentes douces et des escaliers


lundi 5 juin 2023

RAL n°139


Éditorial & Sommaire du numéro

à paraître en juin 2023

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Dossier thématique

« L'inachevé »


Zao Wou-Ki - 1959


ÉDITORIAL


La rubrique PATRIMOINE présente des textes inédits de Jean-Paul de Dadelsen ainsi que cinq contributions consacrées à l’œuvre de cet auteur, abordée sous différents angles.

Le dossier thématique L’INACHEVÉ, introduit par Alain Fabre-Catalan, a rencontré un large écho auprès de nos auteurs proposant des approches variées et complémentaires, tant en français qu’en allemand. Grâce à la voix de Stratis Pascalis, le grec moderne, accompagné de la traduction par Michel Volkovitch, ouvre le concert des langues d’Europe.

Dans la rubrique VOIX MULTIPLES, nous publions un riche panorama de poèmes et de proses, écrites dans les langues habituelles de notre revue. Relevons que Jean-Christophe Meyer nous a fait parvenir un cycle poétique en dialecte haut-rhinois, composé tout récemment.

Les CHRONIQUES s’ouvrent sur une méditation de Paul Assall, consacrée au parcours mystique des différentes sculptures sur les portails de la Cathédrale de Strasbourg. Ce même auteur offre également une réflexion sur l’itinéraire d’Yvan Goll. Grâce à Vladimir Fišera, nous retrouvons la présence d’un poète ukrainien.

Les NOTES DE LECTURE viennent compléter ce numéro.

Pour illustrer ce numéro, Catherine Wackenheim-Jacobs a réalisé une belle série de photographies du Studium, le nouveau bâtiment du campus de l’Esplanade, dont nous avons retenu cinq vues différentes.

Nous souhaitons à nos lecteurs un bel été et leur donnons rendez-vous cet automne pour une Assemblée Générale.

Maryse Staiber & Marie-Thérèse Wackenheim

Le site internet dédié à la revue, créé par Alain Fabre-Catalan qui en assure l’administration, rend compte de notre actualité littéraire. Les auteurs y trouveront toutes les informations utiles pour connaître les thèmes abordés dans les prochains numéros. Le dossier thématique du numéro 140 de décembre 2023 s’intitulera DEMAIN.


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SOMMAIRE


Catherine Wackenheim-Jacobs : Le Studium, une façade tout en courbes  

PATRIMOINE

Jean-Paul de Dadelsen : Watteau (sonnet inédit)   
Jean-Paul Sorg : Une si précoce maturité   
Jean-Paul de Dadelsen : Alsace – Midi. Notes de voyage inédites  
Charles Fichter : Jean-Paul de Dadelsen à Marguerite Yourcenar.  
Lettres « de guerre » entre 1940 et 1943
Martine Blanché : Le Ried de l’enfance chez Jean-Paul de Dadelsen  
et Claude Vigée
Mathieu Jung : Faire vivre la baleine : de Dadelsen en Gadenne  
Elias Levi Toledo : Notes sur l’écoute comme écriture  

Catherine Wackenheim-Jacobs : Des pentes douces et des escaliers  

L’INACHEVÉ

Alain Fabre-Catalan : Le levain de l’inachevé  
Marie-Yvonne Munch : L’inachevé est un jardin  
Emma Guntz : Unvollendet  
Stratis Pascalis : Ο,ΤΙ ΔΕΝ ΕΙΠΕ Η ΣΑΠΦΩ / Ce que Sappho n’a pas dit    
Eva-Maria Berg : L’inachevé / Das Unvollendete  
Gilles Marie : En voie d’achèvement  
Marlena Braester : À l’inachevé  
Max Alhau : Loin de toute échéance  
Alain Fabre-Catalan : L’inachevé nous fait signe  
Germain Roesz : Faire face est le visage de l’inachevé  
Claudine Bohi : L’inachevé des mots  
Anne-Marie Zucchelli : Au gré  
Christiane Roederer : Cabotage dans l’inachevé  
Maryse Staiber : Spruch vom Unvollendeten  
Françoise Urban-Menninger : Les vies inachevées. L’ourlet des jours  
René Heyer : Enfin  
Pierre Judide : Jusqu’au fond de l’inachevé
Fabrice Farre : Fragments
Sophie Weill : Inachever sans fin
Marie-Jeanne Langrognet-Delacroix : Méditations inachevées
sur l’inachevé
Laurent Bayart : Un point final
Alix Lerman Enriquez : Jour inachevé

Catherine Wackenheim-Jacobs : Le Studium, un lieu de rencontre

VOIX MULTIPLES

Martine Blanché : Caravage. Tableaux d’exposition (Georgia O’Keeffe).
Je regarde ta montre de gousset.
Markus Manfred Jung : ars vivendi
Natacha Lafond : Regard VI, VII, VIII, XIX
Mathieu Hilfiger : Le vieux clou
Andrea Moorhead : Sommeil sans trêve
Claude Vancour : L’arbre enfant. Malgré l’automne. Devoir
Daniel Martinez : Lisières des figures
Laurence Muller : Le lustre du jour éclate
Michael Benaglio : Der Blender. Der kreative Akt
Denis Leypold : Ce bel été 1967
Claudia Scherer : Das unvollkommene Gesicht
Gabrielle Makli : Trois femmes attendaient
Karlheinz Kluge : Der Meister geht. Das Herz des Regenwalds
Élie Mavougnou : Aléas de la vie
Joachim Kaboré-Drano : Regards croisés
Jean-Christophe Meyer : S Karnelkimme / La graine a germé
Pierre Zehnacker : Sur un portrait de Durer. L’angoisse de Jérôme Bosch.
        Le poète, le diable et le Bon Dieu

Catherine Wackenheim-Jacobs : Avez-vous oublié vos bouchons d’oreilles ?

CHRONIQUES

Vladimir Claude Fišera : Guerre et poésie en Ukraine aujourd’hui :  
Pavlo Vichébaba
Paul Assall : Ins Offene. Der mystische Lehrpfad am Straßburger Münster  
Paul Assall : Jean sans Terre / Johann Ohneland. Erinnerung an Yvan Goll   
Marie-Yvonne Munch : Hommage à Germaine Richier                             
Maryse Staiber : Georg Baselitz à la galerie Ropac Pantin                           

Catherine Wackenheim-Jacobs : Le Studium, cafétéria Mensae   

NOTES DE LECTURE

vendredi 9 décembre 2022

RAL n°138


2ème semestre 2022


Éditorial & Sommaire

N° 138 - Décembre 2022

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ÉDITORIAL


La rubrique PATRIMOINE de ce numéro est consacrée à deux études de l’œuvre de René-Nicolas Ehni, disparu en juin 2022. Charles Fichter et Jean-Paul Sorg éclairent des aspects majeurs de cette œuvre complexe, engagée et volontiers polémique. 

Notre dossier thématique aborde le thème DIVAGUER sous de multiples angles et perspectives, en veillant à alterner les langues. Comme le suggère la présentation d’Alain Fabre-Catalan, « la littérature invite à la divagation, à l’errance de l’esprit », ce que le dossier illustre.

La rubrique VOIX MULTIPLES s’ouvre à nouveau sur une présentation et traduction de deux poètes ukrainiens. Les nombreux textes qui suivent illustrent bien la diversité linguistique.

Pour commémorer le dixième anniversaire du décès d’André Weckmann, Emma Guntz et Wendelinus Wurth rendent hommage à cet auteur alsacien qui a défendu et illustré la « triphonie ».

Par ailleurs, les CHRONIQUES rendent compte de certaines publications récentes qui pourraient intéresser nos lecteurs. Les NOTES DE LECTURE viennent compléter ce numéro.

Pour accompagner ces pages, nous publions cinq photographies de Marie-Agnès Kopp, essentiellement réalisées en Alsace, en résonance avec la saison hivernale.

Nous vous souhaitons de très belles fêtes de Noël et vous présentons nos vœux les plus chaleureux pour la Nouvelle Année. 

Maryse Staiber & Marie-Thérèse Wackenheim

Le site internet dédié à la revue, créé par Alain Fabre-Catalan qui en assure l’administration, rend compte de notre actualité littéraire. Les auteurs y trouveront toutes les informations utiles pour connaître les thèmes abordés dans les prochains numéros. Le dossier thématique du numéro 139 de juin 2023 s’intitulera L’INACHEVÉ.

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SOMMAIRE


ÉDITORIAL

Marie-Agnès Kopp : La Cathédrale de Strasbourg   

PATRIMOINE

Charles Fichter : René-Nicolas Ehni : quelques scènes de la vie d’un Taugenichts

Jean-Paul Sorg : Geitscherèi ou le démon du langage


Marie-Agnès Kopp : Passerelle de l’Abreuvoir, Strasbourg

DIVAGUER

Alain-Fabre Catalan : Divagations en partage

Marie-Yvonne Munch : Les nénuphars rejoignent les deux rives

Fabrice Farre : En train

Alain Fabre-Catalan : Rives et dérives

Emma Guntz : vagari

Wendelinus Wurth : in de weltgschiicht rumtriiwe

Anne-Marie Zucchelli : nuit volante    

Max Alhau : À l’encontre du temps

Eva-Maria Berg : divaguer

Victor Saudan : Dis vague dis ta vie                   

Pierre Judide : Sublime divagation, la poésie

Sophie Weill : Dits vagues

Alix Lerman Enriquez : Divagation

Markus Manfred Jung : Wirsch alt

Sarah Kirsch : Mon invisible / Amant (traduction : Maryse Staiber)   

Karlheinz Kluge : Kleine Impression, 1970     

Marie-Jeanne Langrognet : Divagation du fleuve rouge

Françoise Urban-Menninger : Divagation sur une page blanche. La divine diva

Laurence Muller : Se réfugier dans le sauvage de la pensée

Daniel Martinez : Un air de regret

Andrea Moorhead : Ce silence au fond de toi


Marie-Agnès Kopp : Forêt du Schoeneck, Vosges du Nord

VOIX MULTIPLES

Vladimir Claude Fišera : Poésie ukrainienne après l’invasion russe de la Crimée en 2014 : Iouri Bouriak (présentation et traduction)

Vladimir Claude Fišera : Poésie de l’Ukraine sous les bombes : Anastasiia Afanas’eva (présentation et traduction)

 Jean-Claude Walter : De la colère

 Jean-Christrophe Meyer : Üssem Wort. De Gruftwaj

Gilles Marie : Promenade sur la plage

Claudia Scherer : handwerker. blue train. in wellen. Langeweil

Laurent Grison : Rimbaud / un poète inachevé

Bernadette Laval : G. est un village…

Markus Manfred Jung : dà nebel / der nebel

Martine Blanché : Romy. La gloriette disparue

Gerad Mucker-Frimmel : Heldenfriedhof. Fortgegangen

Pierre Zehnacker : Le divin. Ne renie pas. La fleur coupée. Le chagrin

Gabriel Singer Gould : Je regarde mon lit / Insomnie

Marie-Yvonne Munch : Les deux tentes sont là

Luminitza C. Tigirlas : L’absentin derrière les deux quidams

Béatrice Machet : Série de tentations

Jacques Stoll : Presqu’île André Malraux. Vulcano

Claude Vancour : Avant le jour, novembre. L’oiseau au coin des emblavures. Spotjohr. Hiver


Marie-Agnès Kopp : La Maison des Tanneurs, Strasbourg

CHRONIQUES

Alain Fabre-Catalan : Le destin d’un poète : Saint-Pol-Roux

Emma Guntz : In memoriam André Weckmann

Wendelinus Wurth : In memoriam André Weckmann

Nicolas Denisot : Retour à Lautenbach

Helmut Pillau : Jakob Sturm – ein Staatsmann aus Straßburg

Helmut Pillau : Leben im Dazwischen. Paul Mendes-Flohr, Martin Buber. Ein Leben im Dialog

Maryse Staiber : Sam Szafran, obsessions d’un peintre

 

Marie-Agnès Kopp : Saintes-Maries-de-la-Mer

NOTES DE LECTURE


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Marie-Agnès Kopp
La Cathédrale de Strasbourg



Dossier thématique

« Divaguer »



DIVAGATIONS EN PARTAGE

Divaguer, errer, chanceler, vagabonder,
on est toujours près de la chute.

Si la littérature invite à la divagation, à l'errance de l'esprit, par la soudaine mise en lumière des mots et des pensées sur le glacis des pages, elle ouvre à qui veut s’y risquer des voies nouvelles à explorer, et sans doute l’occasion de gravir la pente du langage où toute écriture puise sa ressource. Mais l’idée même de « vagabondage » paraît aux antipodes de cette liberté que nous pourrions nous octroyer, essentiellement du fait de la dimension sociale des échanges qui nécessitent le recours à des règles et à un ordre qu’il convient de respecter afin de donner sens à la réalité de ces échanges. Il n’y a en principe nulle place pour le vague, aucune latitude accordée d’emblée si l’on place la création littéraire ou artistique dans un ordre social qui définit par avance ses certitudes et ses droits. L’histoire est là pour nous rappeler combien la création a pu être contrainte par le conformisme social de chaque époque, mais qu’il importe de distinguer celles et ceux qui ont cherché à s’en écarter, à s’éloigner des sentiers tracés par la conformité de leur temps, une manière de cultiver l’improbable, en un mot de divaguer, de laisser place à l’inattendu, à une moisson qui ouvre ses portes sur l’inconnu.

Quel exemple plus frappant pourrions-nous donner de cette volonté d’aller çà et là, de transgresser les limites romanesques afin de suivre dans tous ses méandres les déambulations d’un nouvel Ulysse en la personne de Leopold Bloom ? Il s’agit là du roman de James Joyce, « Ulysse », paru dans son intégralité le 2 février 1922 à Paris, publié par la librairie Shakespeare and Company fondée par Sylvia Beach. Il y a donc cent ans paraissait une œuvre sans précédent placée sous le signe de l’errance et convoquant tous les styles, à tel point que maints lecteurs s’y sont égarés et que ce roman a connu maintes interdictions avant d’être aujourd’hui considéré comme un monument de la littérature mondiale. Il est vrai que le sens de la divagation, propre à Joyce et à cette histoire qui transpose le voyage fabuleux d’Ulysse dans l’Irlande du début du XXème siècle, n’est pas absent de dangers à vouloir s’écarter des chemins balisés et que ce vagabondage de la création n’est jamais loin de la chute, ce qui lui confère un prix inestimable.

Alain Fabre-Catalan


Marie-Agnès Kopp
La Maison des Tanneurs


jeudi 30 juin 2022

RAL n°137

 

1er semestre 2022


À LA MARGE DE LA MARGE


                            À toute marge succèdent d’autres espaces,
des plis et replis, des paperolles, des extra-
vagances d’écrivain, de poète, de nouvelles
marges sans bord et sans limite, enchâssées,
agaçantes ou agacées, de secrètes ambivalences,
des discours à déplier. Sur le dehors de la norme, 
le dehors de la convention, de la règle, au-delà
de l’habitude, du bien séant, de l’admis, loin 
des valeurs reconnues. Une forêt d’outsiders, 
une jungle d’inédits et d’impensés émergent
aux marges des marges.


Marges habitées de questions et
envahies d’émois. Des vivants se
glissent d’un état à un autre, des bords
aux failles, de la feuille annotée perdue
des paletots troués aux franges de la
société sans idéal. En marge, hors champ, 
l’autre n’a plus qualité à être inclus à la
majorité. Animal non référencé, révolté
irrégulier, étranger au commun, ignorant
la langue, irréductible à l’ensemble circonscrit
par des codes. Dans l’indéfini, l’opposition,
le face à face, de part et d’autre de la ligne
de partage, à la frontière, vagabond exotique
ou guerrier farouche, dans la marge choisie
ou subie du rejet, de l’exclusion.


                                      Dans les marges désaliénées respirent
la différence, l’inconnu, l’improbable,
se hasardent le dangereux, le malchanceux,
s’épanouit l’heureux. Zone interdite,
à scandale de l’original ou du libertaire,
à coups de dé du bizarre, à jets de pierre
                                du révolté, du sauvage provocateur
précurseur et créateur. Hors du territoire,
hors des sentiers battus, hors des grilles,
hors normes, asiles et protections, hors X
et Y, hors classe, hors genre. Inadapté.
Irrégulier. Étranger. Apatride. Toujours
du monde des altérités.


Frontières ténues. Ponts incertains
des audacieux. Marges d’espérance,
marges d’actions, d’inventions, de
débordements. Sources d’expansions,
d’enrichissements, elles affichent de joyeuses
manœuvres de piraterie, des largesses
impertinentes avec l’ivresse des vainqueurs,
l’orgueil des performances revendiquées,
classées au palmarès des marges incluses,
des références conquises conquérantes.
Marges entrées dans la norme, admises,
drapées de la gloire de la réussite.
À terme normalisées. Alors des marges
des marges se tissent les cocons
chrysalides des futurs rivaux,
les métamorphoses de l’avenir.

Marie-Yvonne Munch


Marie-Haude Steyer - Écriture


ILLUSTRER « MARGES »


« Limites et frontières » telle est la thématique qui traverse mon histoire dans la peinture. Je m’en explique à travers un écrit qui retrace le parcours. Les mots libérés ont affuté les couleurs et leur présence dans une certaine lecture que je me suis appropriée avec le temps.

La « marge » est en conséquence dans mes cordes mais pas en couleurs, elles deviennent invisibles en version dite « noir et blanc ». C’est tout le propos de la vibration qu’opère des teintes aux valeurs similaires ; comment les mettre à jour sur une palette de gris… Alors je prends l’initiative des encres récemment travaillées et qui ne me caractérisent que partiellement.

Il faut entendre « marges » dans la variété que ce mot propose et ça tombe bien car le pluriel ici ne démentira pas la diversité, au contraire. 

Et puis… si je peux proposer une définition de l’acte de créer en appliquant sagement la thématique, je dirais que la « marge d’erreur » y est fondamentale et c’est tout l’intérêt de s’y confronter, de la laisser être et s’émanciper - à son insu - sans pour autant se perdre.

« Laisser à la peinture son espace, son mouvement, ses doutes et qu’elle me surprenne. »

Marie-Haude Steyer


Marie-Haude Steyer - L'ange